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09/05/2025

L’escalade tarifaire de Trump & ses effets sur la logistique et le commerce mondial

LFC Conseil
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Depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche en janvier 2025, les États-Unis ont rapidement mis en place une politique commerciale très protectionniste sous la forme de mesures tarifaires agressives étendues. Si ces mesures touchent les adversaires commerciaux traditionnels des USA comme la Chine, elle n’épargne pas ses alliés historiques comme l’Union européenne, le Canada et le Japon.
Ces annonces et décisions du président américain redéfinissent significativement l’équilibre commercial mondial et imposent des contraintes sévères aux acteurs du transport, de la logistique et de la chaîne d’approvisionnement globale.

L’Union européenne, une cible des nouvelles barrières douanières

L’Union européenne figure parmi les blocs économiques les plus visés par la nouvelle stratégie tarifaire américaine. Les États-Unis ont en effet rétabli des droits de douane de 25 % sur l’acier, l’aluminium et les automobiles importés d’Europe, mais également imposé une surtaxe généralisée de 10 % sur la majorité des autres produits européens.

En réaction, Bruxelles a conçu un plan de représailles d’une ampleur sans précédent, couvrant un large éventail de produits d’origine américaine, notamment des produits en acier et en aluminium, des ustensiles de cuisine, des produits ménagers, des motos, des yachts et des bateaux, de la volaille, du café, du thé, des huiles, des graines de soja, des amandes et d’autres produits agricoles et industriels.

La réponse européenne, publiée au JOUE 2025/778 comprend 3 phases :

  1. Une première phase qui devait entrer en vigueur le 15 avril, portant sur une série de produits US avec des droits additionnels ad valorem de 10% et de 25%
  2. Une deuxième phase pour le 15 mai 2025 avec un droit additionnel de 25%
  3. Une troisième tranche de contre-mesures est actuellement prévue pour entrer en vigueur le 1er décembre 2025

Mais dans le même temps, l’Union Européenne a publié le règlement 2025/786 suspendant les phases 1 et 2 jusqu’au 14 juillet, le temps de négocier avec les américains.

Sur le plan économique, ces frictions tarifaires fragilisent l’industrie exportatrice européenne, particulièrement en France, en Allemagne et en Italie, où les secteurs automobile, aéronautique et sidérurgique sont des piliers industriels majeurs. Les PME orientées vers l’export sont particulièrement vulnérables, un recul de leurs débouchés américains pouvant engendrer des pertes d’emploi significatives.
En parallèle, les hausses tarifaires sont directement répercutées sur les consommateurs avec une augmentation des prix générale dans l’UE, alimentant l’inflation et réduisant le pouvoir d’achat.

D’un point de vue logistique, les transporteurs européens voient les formalités douanières se complexifier et les délais de dédouanement s’allonger avec une augmentation des coûts de fret maritime et aérien. Cela pousse les opérateurs à reconfigurer leurs routes commerciales, accroissant les risques d’engorgement aux ports d’entrée et modifiant les schémas d’entreposage.

La Chine et la spirale des surenchères tarifaires

La Chine continue de faire face aux sanctions américaines les plus lourdes : les tarifs américains sur ses produits atteignent désormais 145 %, couvrant un large éventail de biens manufacturés et technologiques. Washington envisage de réduire ces droits à une fourchette comprise entre 50 % et 54 % à la conditions que des négociations bilatérales ette détente reste conditionnée à des négociations bilatérales prévues en Suisse ce weekend du 10 et 11 mai 2025.

Pékin a riposté immédiatement en imposant des droits allant jusqu’à 125 % sur les produits américains, tout en limitant l’exportation de ressources stratégiques telles que les terres rares, essentielles à l’industrie technologique occidentale. Cette dynamique a contribué à ralentir la croissance chinoise, à peser sur les zones industrielles côtières fortement dépendantes de l’export, et à accélérer les mouvements de relocalisation de la production vers l’Asie du Sud-Est.

Pour les transporteurs, la guerre commerciale sino-américaine, et ses incertitudes tarifaires constantes, bouleverse les flux avec une diminution des volumes conteneurisés entre la côte est américaine et les ports chinois et le détournement des routes vers des marchés tiers. Les affréteurs se voient donc dans l’obligation d’ajuster leurs stratégies contractuelles et de renforcer la flexibilité des chaînes logistiques.

Canada et Mexique : partenaires sacrifiés de l’AEUMC

Malgré le fait qu’ils soient signataires de l’Accord États-Unis-Mexique-Canada (AEUMC), le Canada et le Mexique ne sont pas épargnés par la politique douanière agressive de Washington.

Concernant le Canada, il se voit faire face à des tarifs de 25 % sur la majorité de ses exportations vers les États-Unis (hors produits énergétiques qui sont taxés à 10 %). La riposte des canadiens a été immédiate avec des droits de rétorsion équivalents sur près de 30 milliards de dollars américains de produits. La Banque du Canada a cependant exprimé ses préoccupations majeures quant aux conséquence de cette guerre commerciale sur la stabilité financière nationale car les entreprises canadiennes, notamment dans le bois d’œuvre, l’agroalimentaire et les métaux, sont confrontées à une hausse de l’insolvabilité. De plus, l’endettement élevé des ménages, combiné à l’inflation importée accroît grandement les risques de défauts bancaires.

Le Mexique, quant à lui, est confronté à une taxation similaire sur les biens non couverts par l’AEUMC, c’est à dire environ 50 % de ses exportations vers les États-Unis. Cela affecte directement les industries automobile, agroalimentaire et textile, créant une pression sociale accrue dans les États frontaliers.

Dans les deux cas, les entreprises de transport et de logistique doivent gérer des contraintes inédites comme l’augmentation des coûts à la frontière, l’inspection renforcée des marchandises, les révisions fréquentes des manifestes, et le recours accru à l’entreposage temporaire.

Japon et Royaume-Uni : entre fragilité diplomatique et réalignement commercial

Le Japon subit, quant à lui, une surtaxe de 25 % sur ses exportations automobiles et de 24 % sur ses autres produits, bien que cette dernière ait été abaissée temporairement à 10 % pour une durée de 90 jours. Les négociations commerciales engagées n’ont pas encore permis de sceller un accord définitif, maintenant une incertitude constante pour les industriels japonais.

Les conséquences sont particulièrement visibles dans le secteur automobile, où Toyota a évalué à 1,3 milliard de dollars les pertes induites par ces droits de douane en seulement deux mois. Cette instabilité impose deux alternatives aux constructeurs japonais : soit envisager des relocalisations aux États-Unis, soit renforcer leur présence sur d’autres marchés asiatiques.

Le Royaume-Uni, lui, a signé un accord commercial limité avec les États-Unis, sans obtenir de levée des droits de 10 % sur ses exportations. Cette entente partielle est davantage perçue comme un geste diplomatique que comme un levier économique. Les exportateurs britanniques, déjà fragilisés par le Brexit, subissent en effet une perte de compétitivité et une baisse de confiance des investisseurs étrangers.

Sur le plan logistique, ces évolutions obligent les opérateurs britanniques et japonais à diversifier leurs flux vers d’autres marchés (ASEAN, Australie, Afrique) et à restructurer leurs hubs de distribution pour compenser l’accès restreint au marché américain.

Le secteur du transport international en pleine reconfiguration

L’ensemble de ces tensions tarifaires affecte profondément le secteur du transport et de la logistique internationale. Les transporteurs maritimes constatent une réallocation des flux vers des ports secondaires, une augmentation des délais de transit liée à des procédures douanières plus strictes, ainsi qu’un ralentissement des contrats long terme au profit de solutions plus flexibles mais plus coûteuses.

Les transitaires et courtiers en douane doivent faire face à une demande accrue de conformité réglementaire, obligeant les entreprises à renforcer leurs départements douaniers et à s’équiper de logiciels de gestion tarifaire dynamique. Le marché du fret aérien est également perturbé, avec une volatilité accrue des tarifs due à la réorganisation des volumes intercontinentaux.

Cette nouvelle vague protectionniste lancée par l’administration Trump a pour conséquence une modification en profondeur des règles du commerce mondial. Au-delà des pertes immédiates en termes d’échanges, ce sont les modèles économiques des exportateurs, des transporteurs, des industriels et des distributeurs, qui doivent se réinventer dans un monde plus fragmenté, plus incertain, et moins coopératif.

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